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Je lis au lit
5 septembre 2013

Encore et jamais de Camille Laurens

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 Camille Laurens propose là une variation littéraire sur le thème de la répétition....différence et répétition, comme dirait notre cher philosophe. Les chapitres déploient au fil du livre ce leitmotiv, autour de différents sujets : l'art bien sûr mais aussi, l'amour...c'est incontournable, ou plus prosaïque...le ménage dans la maison. Et toujours en filigranne la question : la répétition, est-ce l'ennui mortel, le train-train qui lobotomise ou ce qui donne une architecture solide à nos existences? Ni l'un ni l'autre évidemment, car on ne répète jamais à l'identique, tout est dans les légers pas de côtés octroyant à ce que l'on ressasse l'infini de la variation, de la fugue, comme on dirait en musique... "Si la répétition nous rend malades, c'est elle aussi qui nous guérit ; si elle nous enchaîne et nous détruit, c'est elle aussi qui nous libère". Gilles Deleuze

L'auteur est partout présente dans ces pages, elle cause de son expérience, de ses goûts, des spectacles qu'elle voit, de ces livres et de ses auteurs préférés, de ses amours. En cela, le livre s'apparente à un genre d'autofiction, et rejoint ce que Camille Laurens a l'habitude de faire. Mais il s'en éloigne aussi car il fleurte souvent avec l'essai plus théorique et général. Et là, je n'ai pas toujours été convaincue... Camille fait trop souvent sa professeur, elle étale sa culture, et nous assène des réflexions un tantinet soporifiques. Trop de pages ressemblent ainsi à des cours....cours d'esthétique, cours de sociologie, cours tout court... et cela devient un peu pédant, ronflant.
L'ensemble est toutefois sauvé par le sens aigü de la langue de Camille Laurens. Elle est douée, très douée pour triturer brillamment les mots dans tous les sens, l'étymologie, les double-sens, les triple-sens des termes et des expressions sont exploités à fond...on pense alors aux textes publiés dans le recueil Le grain des mots. On sent aussi l'influence de la psychanalyse qui s'attache aux mots que l'on emploie, à leur résonance et à leur portée.
 Et puis tous les chapitres franchement autobiographiques m'ont vraiment touchée. Le premier texte, l'ouverture du livre, aborde d'entrée le thème de l'angoisse et m'a percutée de plein fouet... il a fait sens pour moi... car très souvent, trop souvent, j'ai éprouvé exactement ce que décrit là l'auteur.  Ce premier paragraphe fait partager, avec force et vérité, ce mal terrifiant qui surprend dans le lit au petit matin, cette douleur, cette sensation ressentie physiquement dans le ventre et les poumons, qui englue et qui paralyse, cette angoisse sans objet, autour d'un trou noir, l'angoisse d'angoisser peut-être. Et le chapitre 29 déploie le sujet, cette "peur sans raison, sans danger sur quoi raisonner, sans bête à prendre par les cornes... qui se ramène le matin comme une servante chargée de mon réveil".
De même, le centre du livre aussi, sur la mort de Philippe est très beau, avec ce parallèle étonnant entre un livre qui doit s'épuiser et le bébé qui s'est épuisé dans le ventre de la mère avant de mourir...

De Encore et jamais, livre patchwork et fragmenté, chacun retiendra donc ce qu'il veut, et les chapitres qu'il préfère, au gré de ses humeurs et de ses envies, et c'est peut-être après tout l'essentiel...

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