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Je lis au lit
17 janvier 2014

Une année qui commence bien de Dominique Noguez

 

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Voici un livre tout aussi irritant qu'intéressant... Dominique Noguez entreprend de détailler par le menu, jour par jour, et même parfois heure par heure, une histoire d'amour vécue il y a plus de dix ans avec Cyril, un jeune homme alors. Il s'appuie de manière très documentée sur ses agendas, ses éphémérides, des lettres, pour se plonger dans cette histoire, et peut-être pour la mettre une bonne fois pour toute au placard... Se déroule alors au fil du livre une de ces relations complètement déséquilibrées hélas qui laissent un goût amer, une relation à laquelle l'auteur s'est accroché durant plusieurs années, amoureux transi, subjugué par la beauté de son jeune compagnon, mené par le bout du nez et par le reste...

Récit irritant certes car le style du bonhomme, que l'on associe du coup à sa personnalité, est assez vieille France, un brin conservateur par rapport à la "beeeelle langue française", à la fois précieux et frisant parfois avec le ridicule, ampoulé. L'écriture semble alors aller de concert avec la personne de l'écrivain, universitaire et intellectuel parisien enfermé dans son petit monde, un peu frileux et soucieux, semble-t-il, de donner une bonne image de lui-même ... Dominique Noguez fréquente des gens bien, genre Philippe Sollers and co, il sort tous les soirs à l'Opéra ou au restaurant, il n'aime pas faire de vagues... Je n'ai pas d'abord pas compris d'abord pourquoi le personnage semble faire si grand cas de sa réputation, au point de ne pas vouloir affirmer son homosexualité en public, comme si dans le milieu des intellectuels parisiens cela était un souci... 
Mais attention ce livre s'avère bien plus fin qu'il n'apparait et son auteur avec. Car voilà que ce dernier nous explique très clairement que cet apparent grand souci du quant dira t'on n'est en fait qu'une forte réticence à dévoiler sa vie privée à son entourage, une forme de pudeur. Disons que pour Noguez, il y a l'extérieur et l'intérieur, le public et le privé, et les deux mondes ne doivent pas forcément se mêler. On mesure donc combien ce livre qui justement n'est qu'une longue exposition de soi, va à l'encontre de la personnalité publique de l'auteur. La littérature comme révélation de soi aux autres... Et on s'aperçoit au fil de cette longue confession que ce que l'on croyait être du conformisme n'était que de la réserve, il s'en explique d'ailleurs très intelligemment. Et puis, au sujet de ses goûts littéraires, quand il nous dit qu'il adore Houellebecq depuis la première heure comment l'accuser d'être confiné dans son petit monde ?

Fondamentalement ce dont parle ce livre, l'humiliation consentie lorsqu'on accepte tout par amour, la souffrance du désir inassouvi, la douleur d'une passion non réciproque, voilà qui est bouleversant... Comment ne pas verser une larme quand l'auteur nous avoue pour finir que cet amour bancal, sans réciprocité réelle, pour un jeune gars égoïste et trop gâté a été, pourtant, la plus belle relation qu'il ait jamais vécue... J'ai du mal à imaginer les autres le pauvre!... Dominique Noguez affirme n'avoir jamais connu de son existence l'amour partagé, sa  vie sentimentale et sexuelle est d'un pathétique terrible, et à aucun moment, nous dit-il, il n'a pu faire concilier  désir et amour, sexe et affection ... quel bilan lucide et d'une tristesse infinie... Finalement Cyril, de manière désinvolte et souvent cruelle, lui aura tout de même offert des "lambeaux d'amour" et cela est mieux que rien... 

Au final, Une année qui commence bien, malgré son écriture un peu amidonnée et coincée aux entournures, m'a touchée, émue... Cette radioscopie minutieuse d'une passion, l'ai lue comme le récit du don de soi, à la fois dans l'amour et dans l'écriture.

Ed. Flammarion, 2013

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