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Je lis au lit
14 juillet 2013

L'échappée de Valentine Goby

images

L'échappée est un livre qui m'a un peu échappé au départ... Comment dire?  Dans les premières pages, je nej parvenais pas à me glisser et à m'immerger dans l'histoire, toujours un peu à distance des personnages, j'avais l'impression tout en lisant qu'un voile me séparait de ceux-ci, m'empêchait d'adhérer à leur univers. Au départ seulement...

Le roman déroule des thèmes forts, suit des pistes passionnantes... Une jeune fille de seize ans, Madeleine, bonne dans un hôtel à Rennes au début de la guerre, rencontre un soldat allemand, pianiste, qui joue pour les officiers occupants. Ils ont une brève liaison, elle tombe enceinte... Joseph Schimmer ne le saura pas, puisqu'envoyé sur le front russe, il s'y suicidera. A la libération, Madeleine, comme beaucoup d'autres femmes, sera tondue, insultée et humiliée en public... et toute son existence, ainsi que celle de sa fille Anna, sera déterminée par cette expérience traumatisante. Le récit aborde ainsi le sort des enfants nés entre la France et l'Allemagne, marqués par le sceau de la honte, privés de père... 

Alors quoi?  Trop peu d'arrêts sur image dans ce récit qui avance, avance,  et au sein duquel peu de scènes paraissent se détacher, fondues dans l'ensemble? Le rythme de la narration et celui des phrases, à la construction souvent similaire, crée c'est vrai un curieux effet de monotonie. On aimerait secouer cette écriture, y insuffler de la vie, de l'élan, de l'impudeur, envoyer un peu de jeu dans tout cela, y mettre un peu de violence, de bazar, le bordel. Oui mais.... Faut-il se fier à cette première impression? Car la monotonie fait partie de la vie, et  bien sûr de celle de Madeleine, jusqu'à ce que l'amour puis la maternité bouleversent tout...
 Car finalement bien après sa lecture, ce roman reste présent en moi,  des scènes et des images surgissent encore au détour de mes pensées...
 L'Echappée est donc un roman qui surprend et saisit, il touche au coeur mais sans emphase ni bruit. Valentine Goby est un écrivain, un vrai. Lisez ainsi les passages mettant en scène l'amour entre Madeleine et Joseph. Alors la retenue dans l'écriture, l'art de la suggestion, les non-dits font merveille... en quelques phrases tout est dit : la passion naissante, le rapprochement des corps et le désir irrépressible. C'est aussi le cas pour la scène sans doute fondatrice du livre, la scène centrale, celle où Madeleine est tondue en public, à la Libération. Une scène d'humiliation totale, un viol en public. Là, le changement de point de vue, l'utilisation de la première personne, les détails très concrets permettent d'être avec et non à côté du personnage. La violence de la scène, la cruauté et l'injustice du sort réservé à Madeleine se détachent avec force.  "Je vais être une carte souvenir de la Libération, la vraie, celle qui a mis l'Allemagne à genoux, en devanture des marchands de journaux".
Preuve est faite que l'écriture de Valentine Goby n'oublie pas la chair, la  passion, l'enthousiasme et la violence... et que lorsque l'écriture semble trop policée, retenue, glacée, c'est pour mieux faire surgir ensuite l'insoutenable.



 

 

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