Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Je lis au lit
14 avril 2012

La vie est brève et le désir sans fin de Patrick Lapeyre

 

images (9)

     Drôle de bouquin, sur lequel je reste un peu pantoise… J’étais partie dans ce blog, promis juré, pour n’écrire que sur les livres que j’aime, histoire de partager mes coups de cœur et mes (bons) goûts en matière de lecture. Oui, mais que faire des textes qui m’ont à moitié plu, qui me laissent mi-figue, mi-raisin ? Donc allons-y pour vous parler de La vie est brève et le désir sans fin.

D’abord, c’est un titre, certes très lyrique et qui force un peu dans le romantisme échevelé, mais c’est un titre quand même accrocheur. Il me plaît, car oui je pense que la vie est courte et oui je pense aussi que le désir résiste, nous bouscule et nous fait avancer sans cesse, même si parfois on lui dirait bien à ce désir, d’aller se faire voir chez les grecs. Mais s’il n’existait pas, si la vie filait sans désir, à quoi bon rimerait-il de vivre?

Le personnage féminin de ce roman, objet justement  de tous les désirs, s’appelle Nora, elle est jeune et sans doute belle, et elle fait tourner la tête de deux hommes, Blériot et Murphy. Electron libre et insaisissable, elle gravite entre Paris et Londres, où ses deux amants se morfondent en attendant qu’elle veuille bien leur donner signe de vie de temps à autre. Entre flash-back et réminiscences, nous tressons peu à peu l’histoire de ces deux couples, celle de Blériot et de Nora étant la plus essentielle dans le roman puisque nous voyons les choses surtout du point de vue justement de ce Blériot. Marié, coincé entre « l’angoisse de l’infidélité et la dépression de la fidélité », l'auteur nous le montre incapable de choisir, ne choisissant surtout pas, essayant dans un équilibre précaire de garder à la fois sa femme et sa maîtresse, l’une et l’autre lui étant apparemment indispensables. A l’issue du récit nous ne saurons pas grand-chose de Nora, si ce n’est qu’elle est fragile et insupportable à la fois, source de bonheur et de terreur aussi.
Voilà pour le propos de ce livre, c’est court vous me direz, le désir qui fait tourner la tête d’un quarantenaire, on a déjà vu ça cent mille fois. Alors quoi d’autre ?

Le style du roman, son ton heureusement. L’auteur tombe parfois, trop souvent hélas dans le cliché et les situations rebattues, mais souvent aussi, il nous surprend, sa voix séduit, la phrase amuse et clignote, la formule est bien trouvée. Ainsi, chaque fois que je me suis dit « non là c’est trop », quelques lignes sont venues effacer mon ennui, me faire sourire ou me charmer et me permettre de dire que oui, quand même, ce Patrick Lapeyre est un écrivain. Et ainsi de suite, jusqu'à the end, j'ai avancé. Là, nous voici ainsi avec Murphy lors d’une soirée organisée par une collègue de bureau, soirée mortelle où il s’ennuie royalement et où « la vie en société ressemble à un voyage mal organisé, avec des attentes interminables, des conversations assommantes, des gens sans-gêne et des toilettes mal occupées ». Ailleurs, nous voilà avec Blériot, cette victime de «  polygamie caractérielle », heureux d’admirer Nora en culotte et tee-shirt devant lui, et « à cette vue, comme s’il était encore à l’âge où la moindre culotte est faite de l’étoffe des rêves" nous sentons à nouveau " ses connexions nerveuses excitées ». Le récit s’en trouve bien rythmé, au fil de courts paragraphes souvent incisifs, ma foi, le tout s’avère au final agréable.

De plus, raison supplémentaire pour sauver le roman, je trouve que Blériot est un personnage attachant, un genre de loseur, un éternel perdant sans le sou, qui navigue à vue dans la vie, entre une femme séduisante et pleine de fric, ce qui ne gâche rien, ses parents qui perdent peu à peu la tête, et bien sûr Nora, dont il est raide dingue. C'est lui qui ouvre et clôt le roman, nous voyons Nora par ses yeux, son désir, et l'auteur, on le sent, met beaucoup de lui-même dans cet homme ballotté par le cours des évènements.


L’ensemble ne méritait pas peut-être le prix fémina 2010, certes, et j’entends déjà certains médirent en soulignant qu’il s’agit bien là d’un livre pour femmes. Oui, mais quand même il est écrit par un homme non ?

Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
Et aussi sur Facebook

fbook

Publicité